novembre 2015

#Chronique CroissancePlus - Actionnariat salarié, bilan et perspectives suite à la loi Macron

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Jérémie Jeausserand, membre du comité directeur de CroissancePlus, revient sur les mécanismes de l’actionnariat salarié, dans le magazine du réseau d’entrepreneurs.

L'actionnariat salarié : Fédérateur, incitatif, fidélisateur

Le partage des fruits de la croissance avec les salariés de l’entreprise est un des piliers fondateurs de CroissancePlus. Fédérateur, incitatif, fidélisateur, valorisant, il a démontré son efficacité managériale et correspond aux valeurs de l’association. Néanmoins, force est de constater que les évolutions fiscales et sociales de ces dernières années avaient rendu peu attractifs certains des outils dont dispose le chef d’entreprise pour atteindre cet objectif.

À titre d’exemple, les gains sur stock-options sont soumis, entre les mains du salarié, à une imposition similaire à du salaire (taux pouvant aller jusqu’à 45 %), du moins pour la plus-value d’acquisition , qui est souvent la seule effectivement réalisée. À l’impôt sur le revenu s’ajoutent contributions et prélèvements sociaux à hauteur de 18 % du gain d’acquisition, soit un taux global effectif de prélèvement pouvant atteindre 63 % ! En outre, l’employeur doit s’acquitter d’une contribution patronale égale à 30 % de la valeur des options attribuées, et ce dans les trente jours de l’attribution des options, même si les options ne sont finalement pas exerçables ou pas exercées (du fait par exemple d’une condition de présence ou d’une valeur d’action trop basse rendant inopportun l’exercice des options).

Le régime des gains sur actions gratuites n’était que légèrement plus intéressant, se différenciant de celui des gains sur stock-options grâce à un taux moyen légèrement plus favorable du fait d’un régime mixte salaire/plus-value de cession (ce dernier régime, favorable, n’étant applicable qu’à l’augmentation de valeur constatée entre l’attribution définitive, en général en deuxième année, et la cession, en général en quatrième année ).

Les BSPCE, champions de l’actionnariat salarié

Comparés à ces outils, les BSPCE (bons de souscription de parts de créateur d’entreprise) font figure de champion toutes catégories de l’actionnariat salarié : si le bénéficiaire exerce des fonctions au sein de l’entreprise depuis au moins trois ans, le gain sera imposé au taux de 19 %, auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux au taux de 15,5 %, soit un taux global effectif de prélèvement de 34,5 % ! Le problème des BSPCE résulte en fait des conditions drastiques d’attribution posées par les textes : la société attributrice doit notamment avoir moins de quinze ans d’existence au jour de l’attribution des bons, et son capital doit être détenu, directement et de manière continue depuis la création de la société, pour 25 % au moins par des personnes physiques, ou par des personnes morales ayant leur siège en France ou dans l’Union européenne elles-mêmes directement détenues pour 75 % au moins de leur capital par des personnes physiques.

Actions gratuites, un nouveau départ

Conscient de la perte d’attractivité des mécanismes d’actionnariat salarié et des contraintes importantes quant à leur mise en œuvre, le gouvernement a tenté, sous l’impulsion de CroissancePlus et d’autres associations d’entrepreneurs, de réformer ces mécanismes afin de leur donner une seconde jeunesse. Sans aller aussi loin que ce que les entrepreneurs auraient pu souhaiter, la loi dite « Macron » a fait quelques pas dans le bon sens.

Ainsi, concernant les actions gratuites, la contribution patronale est passée de 30 à 20 %, et est désormais assise sur la valeur des actions lors de l’acquisition définitive. Au-delà de la réduction du coût pour l’entreprise, cette réforme permet à cette dernière de ne plus avoir à payer cette contribution si les actions ne sont pas définitivement acquises, notamment si des conditions de performance ou de présence ne sont pas remplies. Par ailleurs, au niveau des bénéficiaires, c’est désormais l’ensemble de la plus-value qui bénéficie du régime des plus-values de cession (c’est-à-dire une imposition à un taux effectif d’environ 38 % en cas de conservation entre deux et huit ans), ce qui en fait un outil enfin efficace au plan fiscal.

Quid des BSPCE ?

Concernant les BSPCE, la loi Macron a sanctuarisé leur régime fiscal et social, tout en assouplissant quelques-unes des conditions d’attribution, comme par exemple la condition liée au fait que la société ne doit pas avoir été créée dans le cadre d’une concentration, d’une restructuration, d’une extension ou d’une reprise d’activités préexistantes. De même, les bénéficiaires peuvent être non seulement salariés ou mandataires sociaux dirigeants de la société qui attribue les BSPCE, mais également désormais salariés ou mandataires sociaux dirigeants d’une filiale de la société qui attribue les BSPCE si cette dernière détient au moins 75 % du capital ou des droits de vote de la filiale et si la filiale remplit les conditions requises pour pouvoir émettre des BSPCE (sauf la condition relative à a détention de capital).

Ces réformes, si elles peuvent paraître de faible envergure au regard du défi qu’ont à relever les entrepreneurs et plus globalement notre pays, sont néanmoins encourageantes et fortes utiles dans de nombreuses situations pratiques. Enfin, la réforme du régime d’imposition des actions gratuites n’est pas sans conséquences sur les schémas de management packages ayant fait l’objet de redressements fiscaux : en effet, comment justifier une requalification en salaire de gains sur cession d’actions acquises moyennant un investissement significatif du salarié ou du dirigeant, alors que les actions gratuites bénéficient désormais d’un tel régime sans que le bénéficiaire n’ait supporté aucun risque capitalistique ?