La France est à la traîne en matière de développement d’entreprises familiales par rapport à l’Allemagne et l’Italie. Comment rattraper notre retard ?
Depuis très longtemps, la France est un vivier d’entrepreneurs et de nombreux fleurons industriels français sont, à l’origine, des entreprises familiales. Dans notre mission quotidienne d’accompagnement des dirigeants, nous voyons bien que le principal obstacle à la pérennité de l’actionnariat familial est la fiscalité de la transmission. Cette complexité fiscale bloque les transmissions avant une succession, et oblige parfois les familles à céder leur entreprise. Si des simplifications ont été apportées ces dernières années avec, notamment, le pacte Dutreil, qui permet de limiter cet impact fiscal, le bénéfice de ce dispositif est encore trop corseté et soumis au respect d’un certain nombre de conditions. À titre d’exemple, les modalités de détention des titres, ou encore la composition de l’actif de la holding familiale sont peu compatibles avec les contraintes de l’économie moderne. Nous avons fait, avec le réseau d’entrepreneurs CroissancePlus, un certain nombre de propositions afin d’assouplir et régler ces problématiques. Nul doute que ces sujets devraient intéresser les candidats à la prochaine élection présidentielle.
Vous accompagnez des groupes familiaux très dynamiques en termes de croissance externe. Quelles sont les spécificités d’une opération d’acquisition réalisée par un groupe familial ?
Les groupes familiaux sont avant tout pragmatiques. Ils se concentrent sur la concrétisation de l’opération d’acquisition ainsi que sur ses bénéfices pour le groupe sur le moyen et long terme. Le processus M&A est donc beaucoup plus direct et axé sur les éléments clés de l’opération. L’acheteur sera par exemple très concentré sur les modalités de règlement du prix, les garanties données par le vendeur et la rétention des personnes clés notamment par la mise en place de dispositifs attractifs. Une autre particularité réside dans la mise en place du financement des opérations de croissance externe qui doit respecter un certain nombre de conditions spécifiques. Les groupes familiaux recherchent en priorité des financements non dilutifs, mais sont aussi attentifs à conserver un levier d’endettement raisonnable, puisqu’in fine, c’est le patrimoine de la famille qui est en jeu. Lorsqu’ils recourent à des financements en equity, l’accent est mis sur les règles de gouvernance : il est essentiel que la famille conserve le contrôle du groupe.
Quels outils préconisez-vous pour favoriser le développement des entreprises familiales françaises ?
Ce qui est important c’est de faire adhérer toutes les parties prenantes, que ce soit les actionnaires, les dirigeants ou les salariés, à la stratégie et aux objectifs du groupe. Pour cela, une manière simple est de mettre en place des dispositifs d’incentive que ce soit sous forme d’actionnariat salarié classique ou de management package. En effet, ces dispositifs permettent de partager les fruits de la croissance à moyen et long terme, tout en laissant le contrôle du groupe à la famille, et en ne perturbant pas la gouvernance de l’entreprise.